L’Ancien Moulin des Pierres de Troisvilles, situé dans le Cambrésis, nous transporte au cœur de l’histoire dès l’année 1756. À cette époque, Marie-Désirée d’Esclaibes, Dame d’Amerval et du Fayt, traversait une période de deuil après la perte de son mari, Messire Michel-Joseph Muxica de la Torre-Button, seigneur du Fayt. Elle résidait alors dans le majestueux château du Fayt, caractérisé par une élégante tour, une salle immense pouvant accueillir jusqu’à 250 convives, et même un escalier souterrain secret menant à la chapelle de Notre Dame de Tongre voisine. Ce château se dressait sur les vestiges d’un ancien château féodal connu sous le nom de château De La Tour, dont l’existence remonte à 1096.
Face à cette situation, Marie-Désirée d’Esclaibes prit une décision audacieuse. Elle entreprit la construction d’un moulin à vent sur ses terres, près du chemin menant au village voisin de Reumont, en utilisant les pierres en ruine du donjon féodal. Ce moulin devint rapidement célèbre sous le nom de « Moulin des Pierres ».
L’histoire ne s’arrête pas là. En 1789, la Révolution française éclata, et le Moulin des Pierres devint un témoin actif de cette période tumultueuse. Le 24 avril 1794, il joua un rôle clé lors de la tragique bataille de Troisvilles, qui opposa les troupes républicaines françaises aux forces alliées composées d’Autrichiens et d’Anglais, déterminés à rétablir la royauté en France. Les chefs des troupes alliées, le duc d’York et le F.M.L. Otto, grimpèrent jusqu’à la tour du moulin pour observer les mouvements des troupes ennemies. Cette position stratégique leur permit de surveiller les troupes françaises à distance et de développer une tactique qui leur permettrait de remporter une victoire décisive.
Le Moulin des Pierres, avec sa tour cylindrique en pierre, est un véritable trésor architectural datant de 1756. Il trône fièrement à Troisvilles, perché sur le plateau, et demeura en activité jusqu’en 1895. Ce moulin puise son essence dans le passé, en utilisant des pierres provenant des ruines du château du Fayt pour sa reconstruction. En 1914, son équipement intérieur fut démonté, et il fut transformé en une résidence sous la houlette de l’architecte André Dufour, avant d’être intégré dans une construction moderne en 1980.
Aujourd’hui, ce moulin représente un précieux vestige de l’activité rurale d’antan, un témoin vivant du mode de vie ancestral de la région, ainsi que de l’emprise ecclésiastique sur le territoire, avec les redevances autrefois versées aux moines. Il incarne un symbole puissant pour cette région, où la richesse du sol a alimenté l’activité économique et les échanges commerciaux pendant des siècles.
Il est essentiel de préserver ce patrimoine bâti, tout en respectant l’environnement et en adoptant une approche économique rationnelle. Il nous appartient de valoriser ce trésor et de développer ses usages, qu’il s’agisse de tourisme et de culture, de préservation de la biodiversité ou de protection de l’environnement. Le Moulin des Pierres de Troisvilles demeure un lien précieux entre le passé et le présent, un témoignage vivant de notre héritage historique.