Au cœur de l’histoire tumultueuse de l’Abbaye de Vaucelles, se dresse fièrement l’échauguette, un symbole intemporel qui incarne l’essence même de cette institution. Son importance est telle qu’elle a été inscrite au titre des monuments historiques en 1987, préservant ainsi son héritage pour les générations futures. Fondée en 1132 par Bernard de Clairvaux, avec les terres généreusement offertes par Hugues d’Oisy, châtelain de Cambrai, l’Abbaye de Vaucelles était jadis protégée par une double enceinte.
La première enceinte, érigée au début du XIIIe siècle, s’étendait sur une longueur impressionnante de 9 kilomètres, tandis que la seconde entourait les bâtiments proprement dits. Cependant, ces murs protecteurs ont été en partie démantelés à partir de 1544, sur l’ordre de Charles Quint. La raison de cette déconstruction était principalement la réutilisation des pierres pour ériger la majestueuse citadelle de Cambrai. Néanmoins, l’histoire n’a pas laissé cette forteresse sans protection, car vingt ans après cette démolition, une nouvelle enceinte a vu le jour, agrémentée d’une dizaine d’échauguettes, dont le dernier témoin subsistant se dresse devant vous.
En 2019, l’échauguette a été acquise par le Département du Nord, déjà propriétaire de l’abbaye depuis 2017. S’en est suivi un diagnostic archéologique minutieux réalisé par le service d’archéologie et de patrimoine, et une restauration soigneuse a été entreprise dans le respect scrupuleux des normes des monuments historiques. Cette précieuse structure a été réinaugurée en mai 2021, accompagnée d’une palissade contemporaine. Les murs d’origine, d’une hauteur de 3 mètres, sont évoqués par de larges panneaux ajourés en acier Corten, habilement reliés entre eux. Ces panneaux illustrent avec grâce les cultures et les productions monastiques traditionnelles, rendant hommage à l’histoire de l’abbaye. Couronnant le sommet de l’échauguette restaurée, une girouette a pris sa place, offrant un clin d’œil au passé tout en se tournant vers l’avenir.
Un blason est également soigneusement représenté, datant probablement du début du XVIIe siècle et tiré des albums de Croÿ, datant des années 1608-1609. Ceci est remarquable, car il révèle une connexion lointaine avec la construction de l’abbaye, remontant à près de 500 ans.
Alors, pourquoi le nom « échauguette » ? Ce terme féminin trouve ses racines dans le francique « skarwahta », une combinaison de « skâra » signifiant « troupe », et « wahta » signifiant « guet ». La distinction essentielle entre une échauguette et une tour réside dans le fait que l’échauguette est toujours adjacente à un mur. Ces petites alcôves de pierre avaient pour fonction de protéger les sentinelles ou les guetteurs. À noter que la première fonction de l’enceinte de l’abbaye de Vaucelles était de délimiter ses possessions et d’affirmer son pouvoir.
Et qu’en est-il de l’abbaye elle-même ? Située à moins de 2 kilomètres à vol d’oiseau au nord-ouest de l’échauguette, elle reste hors de notre champ de vision direct. Nichée depuis neuf siècles dans la vallée de l’Escaut, l’abbaye ne se dévoile pas aisément. Pour saisir son emplacement, il suffit de diriger son regard vers le bas de la vallée et de suivre l’allée d’arbres qui longe le fleuve, s’étirant vers la gauche… Et vous y êtes ! Prenez le temps d’explorer les moindres recoins de cette magnifique enclave. Découvrez les moines, constructions emblématiques du XIIe siècle propre aux monastères cisterciens, ainsi que le palais abbatial du XVIIIe siècle. En parcourant les 7 hectares de parc et de jardins, vous vous imprégnerez de véritables hymnes à la nature et à la biodiversité.
L’échauguette de l’Abbaye de Vaucelles demeure bien plus qu’une simple structure en pierre, elle incarne une époque révolue, un patrimoine vivant, et un lien tangible entre le passé et le présent.